lundi 2 janvier 2012

Hommage à Abdelfattah Omar



Hommage à  Si Abdelfattah Omar

Ce matin il était là, parmi les vivants, préparant une réunion, examinant un dossier, se plaignant de ses détracteurs. Ce soir, tout est fini.
La mort surprend, comme un coup dans l’estomac et on a le souffle coupé : comment le passage a-t-il été si brutal, si incompréhensible, si horriblement douloureux ? Il suffit d’un rien, quelques minutes, un vaisseau qui se bouche et voilà un monde réduit à néant.
Je n’ai pas connu cet homme.  Comme beaucoup de Tunisiens, Je l’ai vu à la télévision et puis je l’ai entendu parler. Par quels chemins, une expression, une intonation nous disent-elles tant de choses ?  Ce grand visage, aux yeux ouverts sur la vie, pas la vie des coups bas et des arrangements. Non, l’autre. Celle où les valeurs sont agissantes et éclairent un être de l’intérieur. Celles qui font un homme, un vrai ! Tout cela s’inscrivait sur ce visage qui ne se fermait jamais, toujours tendu vers autrui, comme une main, comme une promesse…
Comme de pareils visages manquent à notre paysage médiatique actuel ! De ceux qui donnent, sans escompter retour, qui conjuguent présence à soi et  ouverture aux autres, tout cela sur un mode à la fois simple et fort. L’homme était modeste, il n’avait pas besoin d’en rajouter. Pa d’ego à rabibocher, ni de revanche à prendre sur la vie, aucun train de dernière heure à saisir… Non, il était juste là, dans cette tache ingrate qu’il avait acceptée et menée avec la discrétion et la rigueur qui sied aux hommes de qualité.
Au nom de cette qualité, je voudrais m’excuser auprès de Si Abdelfattah : que les derniers mois de sa vie aient été consacrés à dépouiller des dossiers révélant la face honteuse du pays et des êtres. Qu’il ait consacré tant d’heures à débrouiller la crasse des uns, la bassesse des autres, à mettre de l’ordre dans la fange des grands bandits et la mesquinerie des petits opportunistes.
Bien sûr, il ne savait pas que ces dossiers seraient les derniers. Aucun de nous ne sait quel sera le dernier dossier. Mais si les dossiers étaient laids, l’homme les a hissés à son niveau d’exigence, voilà ce qui compte. En partant, Si Abdelfattah Omar nous laisse une grande leçon d’humanité : la qualité d’un être l’emporte toujours ! Un homme de valeur est toujours plus grand que ce qu’il entreprend. Qu’il s’occupe de voleurs ou d’honnêtes gens, c’est sa qualité qui sauve la mise. A l’inverse, quand la qualité fait défaut, tous les alibis sont bons pour se donner du relief…mais les reliefs ne hissent que les montagnes.
Encore Merci, Si Abdelfattah. Paix à votre âme. Le pays ne vous oubliera pas.
  



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